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Eysa Haider (500x300)
Leucémie lymphoblastique aiguë (LLA) de type pré-B

Eysa Haider

Leucémie lymphoblastique aiguë (LLA) de type pré-B

Ottawa ON
Canada

L’intuition d’une mère, la force d’un fils
 

Tout le monde me dit : « Tu es tellement forte… » « Tu es vraiment incroyable. » « Je ne pourrais jamais faire ce que tu fais. » Pourtant, je me suis sentie brisée, anéantie et tellement épuisée que je n’arrivais plus à dormir. Je me sentais si impuissante.

Mon fils Eysa est incroyable. Les mots me manquent pour dire à quel point il est fort; il est une source d’inspiration de tous les instants. Voyez-vous, mon fils… mon plus jeune, mon petit garçon, a reçu un diagnostic de leucémie. La nouvelle nous a été annoncée en septembre 2014. Ce jour, qui a marqué le début de notre parcours cauchemardesque, restera à jamais gravé dans ma mémoire.

Notre printemps a commencé comme tous les autres; comme un nouveau départ, un renouveau, avec le sentiment d’être en vie. Mais mon Eysa, qui devenait de plus en plus faible, était en train de dépérir. Dernier-né de quatre enfants, il a fait son chemin dans nos cœurs tout en bouleversant nos vies, et ce, dès ses premiers cris. Il a toujours été très exigeant et son amour, d’une telle intensité, pouvait vous consumer. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il sait se faire remarquer! Mais là, il souffrait. Il avait tellement mal physiquement qu’on ne pouvait pas lui enfiler un chandail sans qu’il hurle de douleur. Il s’est mis à boiter et il voulait tout le temps qu’on le prenne dans nos bras.

J’étais convaincue, au plus profond de moi-même, que quelque chose n’allait vraiment pas.

Malgré tous les rendez-vous et les visites chez le médecin et aux urgences, nous ne savions toujours pas ce qu’avait Eysa. Il a enchaîné les antibiotiques, les réactions, une toux persistante et des épisodes de fièvre dont il ne semblait jamais pouvoir se débarrasser. Pas une seule fois les professionnels de la santé que nous avons rencontrés n’ont offert de faire une simple analyse sanguine. Nous sommes passés du printemps à l’été dans ces conditions. Mon fils n’était presque plus actif et il pâlissait à vue d’œil.

Puis, une nuit, j’ai fait un rêve qui a tout changé. Quelques années plus tôt, mon mari et moi avions perdu un ami très cher, qui était décédé d’un cancer. Il avait toujours été plein de vie et il comptait énormément pour nous. Dans mon rêve, il était avec mes trois enfants aînés qui étaient adolescents, bien qu’en réalité ils soient tous âgés de moins de 12 ans. Il m’a dit qu’il n’avait jamais pu passer du temps avec eux quand il était vivant, donc il leur rendait visite maintenant.

Cependant, Eysa était complètement absent de ce rêve, comme s’il n’existait pas du tout. Je me suis réveillée en sursaut, et mon oreiller était inondé de larmes. Je suis allée embrasser mon fils sur le front, partagée entre le doute et la certitude. « Je sens que sa vie est en danger, il va mourir », ai-je dit comme si c’était une évidence. Etienne m’était apparu comme un ange gardien dans mon rêve. Le lendemain, un autre ange est apparu, sous la forme d’une amie enceinte. Elle m’a conseillé de communiquer avec son nouveau pédiatre pour avoir un deuxième avis sur l’état d’Eysa.

La suite de l’histoire est horrible. Le nouveau pédiatre a à peine jeté un coup d’œil sur Eysa avant de nous envoyer directement au Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO) pour, vous l’aurez deviné, des analyses sanguines. Et puis, nous avons reçu l’appel tant redouté. « Je suis désolé, mais vous devez vous rendre au CHEO immédiatement; je suis vraiment, vraiment désolé. » Mes genoux ont cédé et je me suis effondrée sur le plancher.

Dès cet instant s’est enclenchée une succession de piqûres, de biopsies, de ponctions lombaires, de perfusions, de vomissements et de douleurs… tant de douleurs. Son taux d’hémoglobine était si bas que le personnel des urgences n’arrivait pas à croire que notre fils était non seulement capable de se tenir debout, mais aussi de sourire et de parler. On nous a dit qu’Eysa avait une concentration de blastes de 97 % dans son système. Si nous n’étions pas arrivés à ce moment-là, il ne lui serait resté probablement que deux semaines à vivre. Sa vie était en grand danger.

Ce parcours a été des plus pénibles et chargé de souffrances pour notre petit garçon, pour nos trois autres enfants qui avaient encore besoin de leurs parents, pour mon mari qui a été mon roc et qui m’a portée maintes et maintes fois, mais aussi pour le reste de la famille : les tantes, les oncles et les grands-parents. Pour tous ceux qui ont été touchés par l’âme de mon magnifique garçon, par sa joie, son amour et sa force sans fin, ce fut une épreuve difficile à traverser.

Eysa a subi trois ans et demi de traitement pour la LLA de type pré-B. Après ses deux premières semaines de traitement intensif et de transfusions sanguines au CHEO, il a obtenu son congé et nous l’avons ramené à la maison. Nous l’avons ensuite accompagné tous les jours à l’Unité médicale de jour pour des traitements qui duraient (parfois) 12 heures. On lui administrait de la chimiothérapie, par voie orale mais aussi par intraveineuse, ainsi qu’une panoplie d’autres thérapies et de médicaments pour aider à contrôler ce monstre qu’est le cancer. De plus, Eysa a subi 17 ponctions lombaires pendant cette période. Après avoir reçu sa première chimiothérapie par intraveineuse, notre fils a cessé de marcher et il n’a tenté de remarcher que dix mois plus tard.

Le 11 décembre 2017 a été la dernière journée officielle de chimiothérapie. C’était un moment doux-amer, car le grand-père d’Eysa, qui habitait avec nous, était décédé quelques jours plus tôt après une longue lutte contre ses propres problèmes de santé. C’était comme si mon père avait attendu de savoir qu’Eysa était de nouveau en bonne santé avant de nous quitter.

Aujourd’hui, Eysa est un jeune homme fort et déterminé; il s’apprête à entrer dans la préadolescence avec beaucoup d’enthousiasme. En décembre 2022, nous pourrons dire qu’Eysa est en rémission. Nous aurons besoin de temps pour composer avec les effets latents des traitements et aider Eysa dans son rattrapage scolaire, mais je sais qu’il s’en sortira haut la main et qu’il pourra enfin vivre la vie à laquelle il a droit. Nous avons tellement hâte de voir ce qu’il accomplira.